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Les scientifiques ont découvert une « Neptune ultrachaude » qui ne devrait pas exister

Cette exoplanète de la taille de Neptune pourrait fournir aux chercheurs des réponses qu'ils cherchent depuis des années.
Sandra  Proutry-Skrzypek
Paris, FR
LTT 9779b
Le système LTT 9779b. Image : Ricardo Ramirez 

Imaginez un monde où une année passe plus vite qu'une journée sur Terre. C'est ce qui se passe sur LTT 9779b, une exoplanète géante dont l'existence et les propriétés sont pour l’instant inexplicables compte tenu de son extrême proximité avec son étoile semblable au Soleil, dont elle fait le tour toutes les 19 heures.

Situé à environ 260 années-lumière de la Terre, LTT 9779b est le premier exemple connu d'un monde de la taille de Neptune avec ce type de période orbitale « ultracourte » de moins d'un jour, selon une étude publiée dans la revue Nature Astronomy. Ce monde étrange est également le seul membre d'une toute nouvelle classe d'exoplanètes : les « Neptune ultrachaudes ». « LTT 9779b promet de faire la lumière sur la nature des planètes de type Neptune, et des mondes en général », explique James Jenkins, astronome à l'université du Chili à Santiago et auteur de la nouvelle étude.

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Les scientifiques ont découvert de petites exoplanètes rocheuses et de grandes exoplanètes de la taille de Jupiter qui tournent autour de leurs étoiles en moins de 24 heures. Mais c’est la première fois qu’un monde comme LTT 9779b apparaît dans ce qu’on appelle le « désert des Neptune chauds », car cet environnement intense autour des étoiles est supposé faire exploser leur atmosphère, ne laissant que des noyaux exposés.

La planète a été repérée pour la première fois en 2018 sous la forme d'une étrange anomalie dans les images du système stellaire LTT 9779, captées par le satellite TESS (Transiting Exoplanet Survey Satellite) récemment lancé par la NASA. Un creux dans la courbe de lumière de l'étoile a laissé entrevoir le passage d’une potentielle planète, un événement connu sous le nom de transit.

Jenkins et ses collègues ont pensé que la période ultracourte pouvait provenir d'une erreur instrumentale, ou d'un faux positif causé par deux étoiles dans un système binaire. « J'ai vérifié tous les résultats des tests produits par l'équipe TESS et j'ai trouvé cela très intéressant, voire tout à fait unique », ajoute-t-il.

Comme la plupart des transits ultracourts finissent par être des faux positifs, Jenkins et ses collègues ont suivi la détection du TESS avec l'instrument HARPS (High Accuracy Radial-velocity Planet Searcher) à l'observatoire de La Silla au Chili. Le HARPS permet de repérer la minuscule oscillation latérale d'une étoile causée par l'attraction gravitationnelle d'une planète en orbite autour d'elle, ce qui permet d'étayer les observations des transits.

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Contre toute attente, l'exoplanète existe vraiment, pour le plus grand plaisir de l'équipe.

« À ce stade, nous étions au septième ciel, car c'était quelque chose de spécial, quelque chose qui pouvait apporter à la communauté des exoplanètes de nombreuses réponses aux questions que nous cherchions ces dernières années, raconte Jenkins. Nous sommes passés de la surprise à l’extase. »

LTT 9779b semble avoir en quelque sorte conservé une enveloppe atmosphérique gazeuse, même face au rayonnement intense de son étoile, qui maintient la planète à des températures fulgurantes d'environ 1 700 °C.

« Des travaux de modélisation théorique sont nécessaires pour tenter de comprendre pourquoi cette planète existe si près de son étoile, tout en conservant une atmosphère, précise Jenkins. Ces questions clés sur l'origine de ce monde nous permettront de mieux comprendre les processus de formation et d'évolution des planètes. »

LTT 9779b est environ cinq fois plus grande que la Terre et 28 fois plus massive, ce qui la rend plus grosse que Neptune mais comparativement plus dense. Son statut d'anomalie en tant que seule Neptune ultrachaude jamais découverte peut aider les scientifiques à comprendre comment différents types de planètes se retrouvent en orbite très près de leurs étoiles.

Il y a quelques mois à peine, des scientifiques ont annoncé la découverte d'une autre planète appelée TOI-849b, d'une taille comparable à celle de Neptune, qui se trouvait également dans le désert des Neptune chauds. Cependant, TOI-849b est exceptionnellement dense et ne conserve qu'une fine couche d'atmosphère, ce qui suggère qu'il pourrait s'agir du noyau exposé d'une planète beaucoup plus grande, de la taille de Jupiter, qui a été dépouillée de son ciel lorsqu'elle s'est trop approchée de son étoile.

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LTT 9779 b est peut-être en train de subir un processus analogue, bien qu'il semble s'agir d'un monde véritablement à l'échelle de Neptune plutôt que des restes calcinés d'une planète encore plus grande. Il est possible que cette planète étrange n'ait été que récemment propulsée dans sa période ultracourte, peut-être par des interactions gravitationnelles avec d'autres planètes dans des régions plus lointaines du système stellaire. Étant donné que le système LTT 9779 n'a que deux milliards d'années, il se peut que cette exoplanète ait un avenir long et tortueux dans lequel elle sera finalement dépouillée de son atmosphère, comme TOI-849b.

Pour l'instant, cependant, LTT 9779b est l'endroit idéal pour étudier l'évolution et le comportement des planètes ultracourtes et ultrachaudes. Jenkins et ses collègues espèrent apprendre de nouveaux détails sur la composition de l'atmosphère de la planète, ou s'il existe d'autres planètes dans le système. « Nous suivons déjà la planète depuis le sol et l'espace, et ces observations promettent certainement d'en révéler beaucoup plus sur LTT 9779b dans un avenir proche », dit Jenkins.

Avec ces données d'observation, « les chercheurs théoriques peuvent tenter d'expliquer les origines de la planète, note-t-il, la grande question étant : pourquoi une planète de deux milliards d'années, qui orbite si près de son étoile que la température dépasse 1 700 °C, a-t-elle encore de l'atmosphère ? Pourquoi toute son atmosphère n'a-t-elle pas été soufflée dans l'espace il y a longtemps ? »

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