"Westworld" parle parfaitement des connards qui pourrissent les jeux en ligne

Heureusement que Westworld ne se joue pas sur un serveur multijoueurs. Sinon, il y aurait un paquet de joueurs morts. La nouvelle série de HBO, dont l'action se situe dans un parc à thème futuriste où de riches clients viennent réaliser leurs pires fantasmes au milieu d'une armée de robots plus ou moins consentants, est l'une des meilleures séries lancées cet automne. C'est aussi la série qui parle le mieux des jeux vidéo, à ma connaissance.

Westworld n'est pas un simple parc à thème. Les robots qui y "vivent" pour servir les humains qui s'y aventurent sont en quelque sorte l'équivalent (en un poil plus complexe) des NPC (personnages non jouables) qui peuplent les jeux modernes. Ils se promènent dans les rues poussiéreuses de Sweetwater, attirant les visiteurs dans des quêtes consistant à traquer des meurtriers ou à retrouver des trésors perdus.

Les personnages - humains - principaux, tout comme les nouveaux joueurs qui débarquent dans un MMO, doivent choisir entre un chapeau blanc et un chapeau noir avant d'entrer. Ce choix fait écho au choix moral entre le bien et le mal que les jeux vidéo modernes proposent bien souvent aux joueurs, mais aussi au système de factions que l'on retrouve dans des jeux aussi populaires que Guild Wars ou World of Warcraft. Quand le scénariste en chef de Westworld propose une nouvelle intrigue, c'est comme s'il parlait d'une extension ou d'un DLC.

Westworld incarne en quelque sorte l'aboutissement des jeux en monde ouvert qui marchent tant en ce moment. C'est un peu ce que pourrait proposer Rockstar, l'éditeur de Grand Theft Auto, s'il disposait de ressources illimitées et d'une technologie un peu plus avancée.

Mais quand tous les jeux multijoueurs, de World of Warcraft à Overwatch, Westworld accueille aussi tous les types de connards que vous détestez croiser online. On y trouve des newbies qui ne comprennent rien, des gosses beaucoup trop jeunes pour être là, et des familles qui gâchent tout. Mais personne n'est pire que le roi des trolls : l'Homme en Noir, incarné par Ed Harris.

L'Homme en Noir, c'est ce mec qui joue depuis beaucoup trop longtemps. Il a tous les meilleurs équipements, il sait où tout le monde spawn, et il ne vit que pour emmerder les autres et atteindre des objectifs qu'il est le seul à connaître. Dans le deuxième épisode, l'Homme en Noir tue tellement de personnages dont les autres joueurs ont besoin pour jouer correctement que les maîtres du jeu envisagent de lui envoyer tout un tas de NPC pour le ralentir.

Harris incarne le genre de mec qui attend là où les quêtes sont attribuées dans World of Warcraft avec son personnage le plus puissant, et massacre les autres joueurs qui ont le malheur de s'y rendre. S'il pouvait attaquer les autres joueurs, il le ferait sans hésiter. Mais en l'occurrence, il n'en a pas le pouvoir, alors il se contente de leur pourrir la vie en assassinant des NPC majeurs.

Les autres "joueurs" de Westworld ne sont pas foncièrement meilleurs, ils sont juste différents - mais tout aussi monstrueux. Logan et William, le doux crétin et la brute refoulée qu'on voit dans le deuxième épisode, sont aussi des joueurs affreux que personne n'aurait envie de croiser. William, c'est le mec doué incapable de jouer en équipe et donc de se faire des amis en ligne, obligé de traîner derrière lui son pote Logan qui ne comprend pas ce qui lui arrive.

Au tout début de sa première visite, Logan aide un vieillard ivre tombé d'une diligence, et le vieil homme commence à lui parler d'un trésor disparu depuis longtemps. Logan a l'air intéressé par la quête, mais William ignore le vieil homme et traîne son ami vers le bordel le plus proche. Plus tard, quand le prospecteur recroise leur route, William plante un couteau dans sa main et emmène Logan à l'étage du bar pour s'y taper des prostituées. Logan porte un chapeau blanc, William un chapeau noir. Tout cela risque de mal finir.

Cela me rappelle d'innombrables raids manqués dans des donjons de World of Warcraft, où nous nous faisions annihiler encore et encore. C'est terriblement frustrant, et c'est ce qui rend Westworld aussi génial. La série me fait ressentir une profonde et étrange empathie envers tous les NPC que j'ai massacrés en jouant à Red Dead Redemption, et me fait détester encore plus tous les connards avec qui je suis bien obligé de jouer en ligne. Je réalise que je ne leur échapperai jamais, quelle que soit l'évolution des jeux.

C'est une série sur la meilleure expérience vidéoludique possible : un terrain de jeu incroyable, illimité et ultra détaillé, le genre de jeu qui fait d'énormes promesses et qui les tient toutes. Les jeux vidéo vont devenir de plus en plus fabuleux et réalistes, mais les joueurs, eux, ne changent pas. Il y aura toujours des idiots pour tout gâcher, même dans le futur incroyable présenté dans Westworld.