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Blue Peacock, quand l’Angleterre inventait la mine nucléaire anti-Soviet

Inquiet d'un assaut soviétique sur l'Europe dans les années 50, le Royaume-Uni a brièvement eu l’idée d’installer des mines nucléaires chauffées par des poules sur le sol allemand.
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Nous sommes en 1954. Les plaies de la Seconde guerre mondiale sont encore fraîches, une bonne partie de l’Europe est un chantier de reconstruction géant, le Japon est toujours en état de choc après Hiroshima et Nagasaki, les nazis ont disparu de la carte et la paix tient, provisoirement. L’URSS et les Etats-Unis, cependant, se regardent en chien de faïence, et la peur du Soviet commence à faire son chemin dans les états-majors européens.

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En Angleterre particulièrement, le souvenir des interminables bombardements de la Luftwaffe est encore frais. Hors de question, donc, de laisser l’Union soviétique marcher sur l’Europe de l’Ouest. Pour stopper une éventuelle invasion, le Royal Armament Research and Development Establishment met donc au point, en 1954, une arme terrifiante : la combinaison d’une mine et d’une ogive nucléaire. Nom de code : Blue Peacock.

Un demi-Hiroshima par mine

Le cylindre métallique, de deux mètres de diamètre et d’un poids de 7 tonnes, renfermait une bombe atomique basée sur Blue Danube, l’engin utilisé en 1955 par la Royal Air Force. Enterrée à 10 mètres de profondeur, chaque mine pouvait produire une détonation de 10 kilotonnes (la moitié de la puissance de la bombe d’Hiroshima) et générer un cratère de 195 mètres de diamètre, sans même parler de la zone de contamination radioactive…

En 1957, convaincu par l’engin, l’état-major britannique en commande 10 et les fait passer pour des générateurs. Le plan : les envoyer chez les troupes anglaises stationnées en Allemagne de l’Ouest et, dans le cas d’une invasion imminente de l’URSS, les enterrer ou les submerger en Allemagne. Une fois positionnée, la mine pouvait être activée à près de 5 kilomètres et l’explosion préparée jusqu’à 8 jours à l’avance. Si l’URSS marchait à l’Ouest, elle serait accueillie par une barrière de feu et de radioactivité.

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Des poules pour couver la bombe

Tout est prêt, donc, à un léger détail technique près. Pour fonctionner, les mines doivent être maintenues à une certaine température, et les premiers tests indiquent qu’elles ne survivront pas à l’hiver allemand. Pour maintenir la bombe au chaud, les ingénieurs de l’époque ont alors une idée totalement absurde : garnir l’intérieur du cylindre de poulets vivants, tandis que les fils seront protégés contre les animaux. Les calculs prédisent que les poulets mourront en environ une semaine. Personne ne le vérifiera jamais.

En février 1958, le ministère de la Défense ordonne de mettre fin à Blue Peacock : l’appareil est trop volumineux, les retombées radioactives sont incontrôlable et surtout, planter des mines nucléaires chez un pays allié sans le prévenir est d’une insondable inconscience. L’histoire des mines nucléaires chauffées aux poulets est tellement absurde que lorsque les documents ont été déclassifiés, le 1er avril 2004, l’Angleterre a d'abord cru à une blague. Deux prototypes seront pourtant construits, et l’un d’entre eux est désormais exposé au musée de l’Atomic Weapons Establishment. En mémoire du projet le plus absurde de la Guerre froide — jusqu'à nouvelle déclassification de documents d'époque.

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