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Verona veut (toujours) vous faire pécho votre pire ennemi

Et si Daniel Balavoine avait raison et que l’amour était plus fort que tout ? C'est le pari de Verona, une appli qui veut vous maquer avec vos ennemis jurés.

Les créateurs d'applis de rencontres déploient des trésors d'ingéniosité pour trouver la poule aux œufs d'or, un nouveau Tinder ou un nouveau Happn, qui exploserait les codes du dating en ligne. La start-up lilloise Tutti Flirty, par exemple, remplace la sempiternelle photo de profil par une vidéo de présentation vidéo de dix secondes. Exit les mythos qui appâtent leur proie avec une photo retouchée. Mais comment attirer le chaland alors que le marché commence à être saturé ? En identifiant sa cible. Une stratégie marketing bien huilée que les start-ups Doctor Love et Sweatt ont assimilée et mise en application. La première réunit les médecins, ce qui est assez cool si vous êtes chirurgien de garde et que vous fantasmez sur une partie de jambes en l'air façon Grey's Anatomy. La seconde permet aux accros au sport de retrouver la meuf aux fesses bombées ou le mec au 6-pack que vous matez discrètement depuis des mois. Autant d'options qui laissent peu de latitude pour rencontrer quelqu'un dans la rue, dans un bar ou chez des potes. Bref, dans la vie réelle. Non, maintenant, on swipe – à gauche ou à droite -, on matche, on s'envoie des gifs, et après on envisage de se donner rendez-vous.

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L'appli Verona, elle, prétend rétablir la paix dans le monde en un swipe. Ça sonne comme le discours de la candidate de Franche-Comté lors de l'élection Miss France mais c'est bien la baseline de cette application américaine. Verona, Vérone, en français, comme la ville qui vit les Capulet et les Montaigu se détester jusqu'à la mort des désormais symboliques Roméo et Juliette. Appellation prophétique s'il en est, puisque l'application a pour vocation de réunir les communautés ennemies. Voguant sur le succès de sa première version qui réunissait les Israéliens et les Palestiniens sur un modèle Tinder-esque, Matthew Nolan, le créateur de Verona, a pris le train des élections américaines en marche en proposant une nouvelle version. Désormais, les Américains qui se détestent cordialement peuvent matcher : Républicains VS. Démocrates, team Hillary VS. team Bernie, et même les supporters de Trump peuvent – enfin – trouver leur moitié dans la communauté latino-américaine. Tout un programme !

Depuis son bureau de New York, Nolan a accepté de répondre aux questions de Motherboard, de parler politique américaine et du véritable amour, celui qui est plus fort que les préjugés.

Matthew Nolan.

Motherboard : La première version de Verona avait pour vocation de réunir les Israéliens et les Palestiniens. Est-ce que ça a vraiment marché ?

Matthew Nolan : Plus que je l'espérais ! On a eu 500 000 téléchargements en moins d'un an et ça continue ! Évidemment, c'était après une guerre qui avait divisé les peuples, donc c'était un pari difficile mais on est très fiers, chez Verona, que ça ait fonctionné aussi bien.

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Entre nous, il y a vraiment des couples qui se sont formés ?

Il y a ce mec qui vit à Ramallah qui a rencontré une fille de Jérusalem, via Verona. Ils ont parlé pendant des mois sur l'application et ils ont voulu se rencontrer, évidemment, mais ce n'était pas si facile. Pendant le Ramadan, en juillet dernier, Israël a ouvert les check-points qui contrôlent les allées et venues des Palestiniens pour rencontrer cette meuf – il l'appelle Juliette – et ils se sont pécho. C'est un exemple super puissant, parce que c'est deux personnes qui sont bloquées de leur côté du mur, et qui sans ça ne se seraient jamais rencontrés. Imagine si les États-Unis construisaient un mur à la frontière mexicaine, on aurait le même problème.

Image : Verona.

Justement, Verona veut désormais réconcilier les supporters de Donald Trump et les Latinos, ce n'est pas un peu naïf ?

Quand j'ai entendu le discours de campagne de Trump et qu'il les a traités notamment de « dealeurs » et de « violeurs », j'ai trouvé ça dingue. La communauté Latino est déjà suffisamment stigmatisée aux Etats-Unis. C'est absurde de les exclure et ça ne devrait pas se produire aux USA. J'ai envie que les gens soient réunis et c'est l'objectif de cette application. Quant aux républicains et aux démocrates, ça me semble être une évidence…

Oui, mais les élections américaines ne dureront pas toute la vie, heureusement…

La version pour les supporters de Donald Trump et les Latinos s'arrêtera après l'élection… Sauf s'il est élu. Mais avec lui, tout est envisageable : Trump et musulmans, Trump contre le reste du monde… En revanche, le conflit républicains vs. démocrates est profondément ancré dans la mentalité du pays. Après, on peut tout imaginer avec Verona : ceux qui aiment les chiens et ceux qui aiment les chats, les habitants de New York et ceux de New Jersey, les mangeurs de fromage et les buveurs de vin… Parallèlement, on est en train de développer une interface pour aider les réfugiés syriens en Europe.

On aura bientôt l'élection présidentielle en France, tu penses arriver à faire matcher les supporters de Marine Le Pen avec qui que ce soit dans le monde ?

On a eu plein de téléchargements en France, ça m'a d'ailleurs vachement étonné. Il y a des israéliens et des palestiniens en France qui ont échangé en hébreu ou en anglais. Donc oui, c'est le prochain challenge pour Verona. D'ici un an, la plateforme sera développée pour la France avec des problématiques plus locales. Par contre, je ne peux pas promettre que des supporters du FN trouveront l'amour…

C'est donc ça la vocation ultime de Verona ? Aider à trouver l'amour ?

L'amour, l'amitié… Ou les deux. Mais surtout, on voudrait que le monde soit un peu plus compréhensif et empathique envers son prochain, sans forcément le juger sur ses postions politiques ou idéologiques. Mais la route est longue…