À quoi ressemblerait un monde peuplé de reptiliens humanoïdes ?

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À quoi ressemblerait un monde peuplé de reptiliens humanoïdes ?

Si des dinosaures intelligents avaient survécu au Crétacé et pris la place des Hommes, à quoi ressemblerait leur société ? Y aurait-il un Dr. Dre dinosauroïde ? Du porno inter-lézards ? David Pujadas serait-il le même ?
Genono
par Genono

Dans la grande encyclopédie du complot, peu de théories trouvent grâce à mes yeux. Les Illuminati ? Beaucoup trop mainstream. La Terre plate ? Pas assez romantique. Les Juifs qui dominent le monde ? Pas hyper envie de me retrouver dans la même équipe que ce mec. Les vaccins qui provoquent l'autisme ? Beaucoup trop "film d'auteur français". Seule l'idée selon laquelle des Reptiliens se cacheraient sous la peau des grands dirigeants de notre monde m'attire un tant soit peu. Déjà, parce que ça a de la gueule. Ensuite, parce que j'ai déjà vu David Pujadas cligner des yeux à la verticale. Mais aussi et surtout, parce que malgré son folklore très farfelu, cette théorie convainc un nombre impressionnant de personnes – le plus souvent pour déconner, mais certains y croient dur comme fer.

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Scientifiquement, il est hautement improbable de voir un être humanoïde - comme le présentateur du JT de France 2 - retirer son masque en peau de Caucasien pour voir apparaitre une pâle copie de Bowser, mais les technologies extra-terrestres sont potentiellement tellement avancées qu'aucune hypothèse n'est à écarter. La théorie la plus répandue suppose en effet que les reptiliens aient une origine extraterrestre. Selon David IckeIcke, le grand spécialiste de l'invasion reptilienne, ils seraient un croisement entre les Anunaki venus de Nibiru - une planète hypothétique à la trajectoire elliptique, qui passerait au voisinage du soleil tous les 3600 ans - et les êtres humains.

C'est une théorie intéressante - et pas seulement parce que Nibiru est l'un des meilleurs titres du Roi Heenok -, mais qui comporte beaucoup trop d'inconnues et de suppositions sans fondement pour satisfaire mon petit cœur d'amoureux de la science. Et puis, on a trop facilement tendance à oublier les grands théoriciens du modèle reptilien au profit du seul David Icke, superstar du complotisme mondial. Précurseur de la lutte anti-lézards, David est devenu au fil du temps l'incarnation de ce qu'il dénonçait : une élite. Et si toute élite est forcément corrompue par les forces au sang froid, alors David est un reptilien. Il répand ses thèses spectaculaires uniquement pour nous tromper : la vérité est ailleurs. Elle est dans les fossiles.

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A la fin des années 1960, le très sérieux paléontologue Dale Russell a découvert les premiers fossiles du Troodon, un dinosaure carnivore bipède - genre de gros dindon - apparu il y a 72 millions d'années, aux caractéristiques intrigantes : avant-bras pivotables -comme les nouvelles figurines Tortues Ninja, ce qui fait déjà une coïncidence de trop -, pouces opposables, et mains préhensiles. En somme, de potentiels as de la manipulation, qui auraient pu utiliser des outils à la manière des singes actuels. Hélas, cette suggestion restera sans doute à jamais une hypothèse invérifiable.

Le truc fun, c'est que les paléontologues pensent que cette capacité à saisir des objets ou des proies avec ses mains permettait au Troodon de maintenir une victime par le cou tout en l'éviscérant avec sa grosse griffe disposée sur le talon. Même si son alimentation était principalement composée d'œufs, l'imaginer ouvrir des ventres avec le pied fait de lui l'animal le plus classe de ces soixante derniers millions d'années - désolé les chiens, vous avez encore quelques efforts à faire. Encore plus intéressant, le Troodon possédait une cavité cérébrale étrangement conséquente en comparaison avec sa taille et son poids – en termes scientifiques : son degré d'encéphalisation excédait largement celui des autres dinos. En toute logique, on le considère aujourd'hui comme le plus intelligent des dinosaures ayant foulé la Terre.

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On récapitule donc : le Troodon se tient debout, possède une vision stéréoscopique, deux pouces opposables, des bras super articulés, est potentiellement capable de manier des outils, en plus d'avoir un blaze futuriste qui aurait pu faire de lui la star d'un film de Steven Lisberger. En somme, et en extrapolant à peine : en persistant dans son encéphalisation, et s'il n'avait pas eu la mauvaise idée de disparaitre prématurément, le Troodon aurait pu évoluer jusqu'à devenir l'équivalent reptilien de l'être humain – une espèce à l'intelligence développée, capable d'appréhender la technologie, de transformer son environnement, et de créer des séries télé surcôtées avec des eunuques et des nains.

C'est d'ailleurs l'hypothèse qu'a émis Dale Russel – le paléontologue qui a découvert le Troodon, donc -, sous forme d'expérience de pensée. Dans un rapport publié en 1982, il imagine la destinée potentielle de descendants des Troodons, portés par une intelligence sans cesse croissante. Evidemment, l'encéphalisation conduit à de nombreuses modifications anatomiques : la tête, devenue plus lourde à cause de la taille du cerveau, doit forcément se redresser ; la diversification de leur alimentation – de purs carnivores à omnivores - aurait conduit à de profondes évolutions de la mâchoire et de la dentition, mais aussi à une lente adaptation à l'endothermie. Afin de compenser les dépenses d'énergies induites par un mode de vie plus évolué, le paléontologue suppose également de raidir les jambes en position debout, et de raccourcir la colonne vertébrale, en réduisant au maximum la taille du cou – sa vision stéréoscopique étant suffisante pour lui permettre de guetter les dangers de chaque côté.

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Quelques manipulations plus tard, notre "dinosauroïde", selon le mot proposé par Russel, est prêt. Consciencieux, Russel s'est même dévoué à créer une maquette réaliste de la créature obtenue. Bien qu'il ne s'agisse que d'une évolution hypothétique parmi tant d'autres possibles, cette expérience de pensée permet de rendre plus concrète l'idée selon laquelle toute espèce correctement prédisposée peut finir par acquérir un degré d'intelligence important, à condition qu'elle soit mise dans les bonnes conditions et qu'un foutu astéroïde ne vienne pas saper ses plans. L'initiative de Russel est fantastique, parce qu'elle applique une vraie méthodologie à une pure initiative de science-fiction.

Mais on peut aller plus loin que l'expérience de pensée menée par Russel. S'il a créé un dinosaure humanoïde, il ne s'est pas posé la question de l'environnement dans lequel évoluerait ce super-Troodon. Aurait-il conquis la planète entière, comme l'Homme au cours des derniers millénaires ? Aurait-il passé plus de temps à faire la guerre qu'à chanter l'amour, comme l'Homme depuis toujours et jusqu'à son autodestruction programmée ? Aurait-il construit une société aussi inégalitaire, avec des dirigeants aussi corrompus, et autant de pervers ? Le chien serait-il devenu le meilleur ami du reptile ? Aurait-on eu droit à un Motherboard reptilien alimenté par des pigistes reptiliens rémunérés en euros reptiliens ?

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Prenons les choses dans l'ordre. A priori, on pourrait supposer que nos dinosauroïdes n'auraient pas pu étendre leur empire au-delà des zones chaudes ou tropicales – une bête à sang froid de plus de cinquante kilos en Scandinavie, c'est un mauvais calcul. Pourtant, Russel estime qu'en adoptant un mode de vie plus évolué - en termes d'alimentation, de déplacements, de confort -, nos reptiliens auraient pu finir par évacuer les problèmes liés à l'ectothermie (le corps ne produit pas sa propre chaleur). Concrètement, les Troodons ne seraient pas devenus des animaux à sang chaud, mais auraient choisi une solution hybride, à l'image du thon, de l'abeille, du rat-taupe ou encore de la chèvre disparue appelée Mitroagus balearicus. Capable d'autoréguler sa température corporelle, notre dinosauroïde aurait donc ainsi pu étendre sa domination à toute la planète, dépasser le cercle polaire, affronter le permafrost russe et les étés parisiens.

Le monde reptilien aurait ses propres élites et son propre David Icke, superstar de la théorie du complot mammalien, accusant les dirigeants et les stars de la croco-pop de cacher des poils sous leur peau écaillée. On est toujours le reptilien de quelqu'un.

Cette évolution, de sang froid à sang tiède, pose d'autres questions : le Troodon aurait-il pu finir par devenir un reptile mammalien ? Et, avec quelques millions d'années d'évolution supplémentaire, par devenir un véritable mammifère - un singe, puis un homme, puis David Pujadas ? La question mérite d'être posée, mais elle amène surtout une nouvelle interrogation : que serait le porno dinosauroïde ?

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Dans l'hypothèse où nos Troodons n'aient pas évolué vers une branche mammalienne, il faut imaginer un porno sans paires de seins. Bien entendu, les mamelles ne sont pas le seul attrait de la sexualité, mais il y a fort à parier qu'une industrie pornographique sans bzez siliconés aurait toutes les chances de se casser la gueule. Si l'on considère que l'attirance masculine pour les poitrines féminines lui vient d'un complexe d'Œdipe mal digéré, et d'une fascination glauque pour les tétées de sa tendre enfance, alors il faut appliquer le même processus aux reptiles. Les Troodons nourrissant leurs petits à la manière des oiseaux – en régurgitant une bouillie d'aliments au fond de la gorge des nouveaux-nés -, le porno dinosauroïde serait donc émétophile : les meilleures scènes impliqueraient donc des femelles vomissant leur bile dans la bouche des mâles - je ne suis personne pour juger.

La société dinosauroïde obéirait probablement aux mêmes hiérarchisations que les nôtres. Certaines espèces de crocodiles respectent déjà ce type de systèmes de classes, avec des mâles dominants, des meneurs, et des individus en bas de l'échelle sociale. On peut donc clairement supposer que les dinosauroïde auraient leurs dirigeants du Cac40, leurs ouvriers mal rémunérés, et leurs secrétaires divorcées. Surtout, le monde reptilien aurait ses propres élites et son propre David Icke, superstar de la théorie du complot mammalien, accusant les dirigeants et les stars de la croco-pop de cacher des poils sous leur peau écaillée. On est toujours le reptilien de quelqu'un.

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Il convient cependant de nuancer le propos précédent, car les stars de la croco-pop ne seraient pas forcément les mêmes que les nôtres. Le reptile – y compris le dinosauroïde imaginé par Russel - ne possédant en général pas de pavillon auriculaire – l'oreille externe-, un mec comme Dr Dre n'aurait pas pu faire fortune dans les casques audio. De la même manière, sans cheveux ni barbe – les reptiles sont imberbes-, les ZZ top n'auraient probablement pas eu la même carrière. Reste la question de la couleur de peau : si le taux de mélanine humain varie d'un coin à l'autre du globe, rien n'indique que ce serait forcément le cas chez le Troodon. On ne peut donc pas prédire si un Michael Jackson reptilien se serait détruit la peau à force de vouloir blanchir, ou si Nekfeu aurait percé dans le rap sans être blanc.

Sur le plan de la mélanine, il est d'ailleurs intéressant de noter que de nombreuses espèces de lézards ont, à l'instar des amphibiens ou de certains poissons, la capacité de changer de couleur en fonction de leur environnement. On peut donc supposer que des dinosauroïdes inuits, à force de se fondre dans leur environnement neigeux, auraient fini par adopter définitivement le blanc, alors qu'une peuplade amazonienne aurait persisté dans le vert. En fonction de la capacité de l'espèce à aller vers l'endothermie, on peut aussi supposer que des dinosauroïdes exposés au froid auraient eu tendance à réduire leur taille et leur masse, tandis que ceux restés dans les zones chaudes et humides auraient continué de s'engraisser. En somme : des géants à proximité de l'Equateur, et des pygmées dans le Grand Nord. Un déséquilibre cruel en cas de championnat du monde reptilien de basket.

En ce qui concerne l'un des plus grands maux de l'humanité, sa propension à faire la guerre, rien n'indique que nos amis reptiles aient forcément plus de chances d'être moins cons que nous. Il suffit d'observer deux crocodiles ou deux varans se disputer une proie pour comprendre tout de suite que le règne animal, même très évolué, ne peut évoluer que vers violence, rage et destruction. Et les dinosaures ne font pas exception, comme le démontre le dernier épisode de Jurassic Park – oui, je considère ça comme une démonstration scientifique.

D'ailleurs, Jurassic Park prouve autre chose : quand on s'appelle Chris Pratt et qu'on a un ami né à Trappes, on peut dompter des dinosaures, même les carnivores. Si l'on suppose que les Troodons aient pu évoluer jusqu'au stade décrit ici en évitant la grande extinction de la fin du Crétacé, alors on peut également supposer que les dinosaures moins évolués aient pu survivre eux aussi. Et donc, qu'ils aient pu être apprivoisés, et servir de monture. Le doux rêve de voir des combats entre Tricératops équipés de sulfateuses et montés par des reptiliens humanoïdes aurait donc été techniquement possible. C'est peut-être un détail pour vous, mais pour moi, ça veut dire beaucoup.

Autre grand mal de l'humanité : surpopulation et inégalité de répartition des ressources. Sur ce plan, l'oviparité est un avantage certain. Beaucoup plus simple que l'avortement de masse, un simple contrôle de la quantité d'œufs suffit à maîtriser une population entière. Et quand une portion de territoire accueille trop de monde, sans disposer de suffisamment de ressources pour nourrir toutes les bouches, il suffit de faire des omelettes.

Mais ce n'est pas le seul avantage sociétal du mode de vie reptile : la retraite n'existe pas chez les dinosaures. En effet, de nombreuses espèces de crocodiles et de tortues ne vieillissent pas – ou très peu. Ces animaux finissent toujours par mourir, bien entendu, mais jamais de vieillesse. Généralement, ils finissent par mourir de faim – car chez les crocos, grand âge va avec grande taille, grands poids, et donc gros besoins -, ou plus simplement, par être exterminés par l'homme. Notre super-Troodon pourrait donc se retrouver dans le même cas de figure, en évitant le naufrage de la vieillesse, et surtout, en préservant les caisses de retraite de l'Etat. Grace à l'agriculture, à l'élevage et aux omelettes, les dinosauroïdes n'auraient plus à se soucier de mourir de faim, et pourraient ainsi vivre plusieurs siècles, le temps d'acquérir une sagesse suffisante pour résoudre les grands mystères de la vie – qui sommes-nous, pourquoi quelque chose plutôt que rien, pourquoi les chiens remuent la queue quand ils sont contents ?

La dernière question à se poser est la plus difficile à résoudre scientifiquement, mais sans aucun doute la plus pertinente : la série V – la première version, pas la bouse des années 2000 - serait-elle aussi cool en inversant les rôles ? J'ai évidemment une opinion là-dessus, mais j'ai bien peur qu'elle soit influencée par les messages subliminaux que m'envoie David Pujadas chaque soir sur France 2.