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Un cerveau de mammifère a ete cryogénisé sans être endommagé

Une équipe menée par un chercheur du MIT aurait cryogénisé un cerveau de lapin sans endommager ses connexions neuronales.

Un événement important vient d'animer le petit monde de la cryonie.

La direction de la Brain Preservation Foundation, une fondation qui finance la recherche sur la préservation du cerveau, vient de décerner un prix à 21st Century Medicine, une entreprise de recherche et développement biomédicale.

En effet, dans un article publié récemment dans le journal Cryobiology, l'équipe de 21st Century Medicine, menée par Robert McIntyre du MIT, annonce qu'elle a cryogénisé le cerveau d'un petit mammifère tout en le maintenant en parfait état. Selon un communiqué de presse de la fondation, « pour la première fois, on a montré qu'il était possible préserver la structure d'un cerveau de mammifère long terme. »

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Les scientifiques travaillant sur la cryonie ont longtemps cherché des moyens efficaces de préserver la collection de plus de 86 milliards de neurones du cerveau humain, avec ses connexions synaptiques. En conservant la structure neuronale du cerveau, certains espèrent que les souvenirs issus de la mémoire à long terme puissent subsister afin d'être récupérés plus tard. D'autres encore rêvent de mettre au point une sorte de technique de voyage dans le temps médical, où un individu pourrait stocker son identité afin qu'une société future puisse lui redonner vie. Oui, comme dans les premières minutes du film Austin Powers.

« Le prochain objectif est de montrer que ces techniques fonctionnent sur des cerveaux de mammifères plus gros. »

Jusque là, l'utilisation de ces techniques semblait sans issue : le processus de préservation endommageait bien trop sérieusement le cerveau pour que l'on puisse espérer le réanimer un jour. Les procédures employées en cryonie aujourd'hui provoquent la déshydratation massive du cerveau et la destruction des connexions neuronales. Le succès récent de 21st Century Medicine n'en paraît que plus extraordinaire.

L'équipe de McIntyre aurait démontré qu'elle était capable de préserver les connexions neuronales d'un cerveau de lapin intact lors d'une opération de cryogénisation. Pour ce faire, les scientifiques ont utilisé une approche dite de « Cryopréservation stabilisée à l'aldehyde. » Ils ont diffusé plusieurs produits chimiques dans le système vasculaire cérébral afin de fixer les neurones, avant de refroidir le cerveau à -130°C pour le transformer en objet vitreux. Par la suite, ils l'ont lentement ramené à une température positive, avant d'éliminer les produits chimiques cryoprotecteurs.

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Les juges de la Brain Preservation Foundation ont ensuite évalué la performance en utilisant la microscopie électronique traditionnelle afin d'observer différentes régions du cerveau et de s'assurer que les connexions synaptiques du lapin avaient survécu à l'opération.

« Chaque neurone, chaque synapse paraissait en parfait état, » explique Kenneth Hayworth, président de la Fondation. « C'est assez incroyable, d'autant plus que j'ai moi-même tenu ce cerveau dans ma main lorsqu'il était à l'état solide. »

« C'est un événement extrêmement important, » ajoute John Smart, co-fondateur de la Brain Preservation Foundation. « C'est la première fois que nous sommes capables de préserver le substrat organique que les neuroscientifiques pensent essentiel à l'apprentissage et à la mémoire. Vu les résultats annoncés, je ne serais pas surpris que les souvenirs à long terme aient été préservés grâce à cette technique. On ne peut bien sûr pas en être certain, et tout le monde ne sera pas d'accord avec moi, mais de mon point de vue, c'est très possible. »

La compétition « Small Brain Challenge » organisée par la fondation avait reçu deux candidatures. La seconde émanait de l'Institut de Neurobiologie Max Planck, en Allemagne. Cette équipe a quant à elle utilisé une technique de plastination afin que le cerveau puisse être conservé à température ambiante. Cependant, il est peu probable que cette opération fonctionne avec un cerveau plus gros.

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L'idéologie transhumaniste promet un futur où il serait possible de se débarrasser de la mort, et est au cœur des ambitions de la cryonie. Quelques chercheurs estiment qu'il sera un jour possible d'uploader nos structures neuronales dans des machines, dans un monde où les personnes vivraient à travers des ordinateurs. Évidemment, rien, dans les avancées récentes en préservation de la mémoire, ne permet de dire que les souvenirs suffisent à définir « qui vous êtes » en tant que personne.

« Nous ne savons pas si ces techniques sont capables de capturer l'essence d'une personne, notamment sa personnalité, et de préserver sa conscience. Les recherches futures nous apporterons sans doute des réponses, mais cela prendra beaucoup de temps, » explique Smart. « Les neuroscientifiques ne comprennent pas encore ce qu'est la conscience et comment elle émerge, même si nous disposons déjà de modèles prometteurs. »

À l'heure actuelle, la préservation des neurones et des connexions neuronales ne garantit en rien qu'une personne pourrait être réanimée, même si son cerveau est en bon état.

La prochaine étape de la recherche en cryonie sera de montrer que ces techniques fonctionnent sur ces cerveaux d'animaux plus gros. La Fondation met d'ailleurs au défi les scientifiques du monde entier de préserver un cerveau de cochon, ou tout cerveau de taille similaire.

Cette performance devrait être réalisée très bientôt. 21st Century Medicine a d'ores et déjà soumis sa candidature, qui est actuellement à l'étude par les juges. Pour le moment, aucune autre équipe ne s'est risquée à relever le défi.

L'idée de préserver son cerveau pour le réanimer dans le futur est sans doute trop étrange et trop absurde pour qu'elle rencontre un jour beaucoup de succès. Smart espère néanmoins que l'annonce de la fondation suscitera une nouvelle vague d'intérêt pour la cryonie.

« C'est une opinion peu répandue, mais nous pensons tout de même que si ces techniques se révélaient efficaces sur des cerveaux plus massifs, nous devrions les rendre accessibles aux citoyens, » affirme-t-il. « Je pense que ce sujet est essentiel, et qu'il faut le discuter. »

« Nous vivons une période particulièrement excitante. Si les choses continuent d'évoluer à ce rythme, nous craindrons bientôt peur que la mort nous empêche d'avoir la fin de l'histoire. »