FYI.

This story is over 5 years old.

Drogue

On a discuté avec la journaliste qui a quitté son job en direct pour s’occuper d’un dispensaire de cannabis

Son ancienne boîte ne peut plus la saquer, mais elle a de quoi se détendre.

À la fin du week-end dernier, après avoir présenté un reportage sur la possible légalisation du cannabis en Alaska, Charlo Green, la présentatrice de KTVA – une chaîne d’infos locale – a démissionné d’une façon très « fuck you – fuck you – you’re cool ». Charlo a arrêté de lire le prompteur et a annoncé à son public alaskien, en direct, qu’elle était la propriétaire de l’unique cannabis social club d’Alaska et qu’elle s’apprêtait en conséquence à laisser le monde des informations derrière elle, afin « d'utiliser toute son énergie dans le mouvement de légalisation du cannabis en Alaska ». Charlo a dès cet instant commencé une nouvelle vie, laquelle consistera à tenir l’unique dispensaire de cannabis de l’État le plus froid des États-Unis. Avant de démissionner, elle a également ajouté, très sobrement : « Rien à foutre. Je démissionne. »

Publicité

Sans surprise, le mélange de cannabis, de gros mots en direct et l’excitation provoquée par cette démission pour le moins abrupte, a créé une grosse polémique – et un gros buzz – autour de la dernière émission de Charlo. On l’a appelée hier matin pour discuter de sa décision d’abandonner sa vie de star locale, de son cannabis social club et du mouvement de légalisation en Alaska qu’elle vient tout juste de mettre en lumière.

VICE : Raconte-moi comment tu as commencé ton « cannabis social club ».
Charlo Greene : Lorsque nous avons acheté une licence d’exploitation le 20 avril 2014 !

Comment se porte le business ?
Ça se passe très bien ! Assez bien pour que j’abandonne une carrière que j’ai passé toute ma vie d’adulte à construire.

Pourquoi as-tu décidé de démissionner dans un style aussi extrême ?
[Rires] Pour attirer l’attention sur le problème. Toi, en tant que journaliste, tu sais que nous ne sommes pas irremplaçables. Tu ne vas pas manquer aux gens ; ni moi, ou n’importe quel autre journaliste. Alors pourquoi ne pas simplement utiliser la place que j’avais pour être certaine que le prochain chapitre démarre sur de bonnes bases ?

Que s’est-il passé ensuite dans le studio ?
Dieu merci, c’était un dimanche soir, donc la plupart des gens étaient dans le studio du bas. Je faisais mon direct dans celui du haut, c’est pourquoi je n’ai pas vu ce qui s’est passé dans la vraie salle de rédaction. J’ai vu que quelques supérieurs à mon étage avaient un peu peur – oui, ils étaient un peu paniqués. Les téléphones n’arrêtaient pas de sonner et j’ai été escortée jusqu’à la sortie. Voilà tout.

Publicité

Et il n’y a pas eu de répercussions depuis ?
La chaîne a supprimé ma biographie et tout ce genre de choses – mais personne ne m’a contactée.

Viewers, we sincerely apologize for the inappropriate language used by a KTVA reporter on the air tonight. The employee has been terminated.

— KTVA 11 News (@ktva) September 22, 2014

Tweet de la part de la chaîne de télé KTVA

C’est cool. Tu as vu leur tweet qui disait que tu avais été virée ?
[Rires] Oui. J’ai vu ça. C’est idiot.

C’est assez dur, je trouve.
[Rires] Oui, et aussi le fait qu’il y ait autant de soutien… si vous allez simplement regarder le tweet qu’ils ont écrit, vous verrez que la seule réponse c’est : « Non, vous avez tort les gars. Elle a simplement démissionné. On l’a entendu. On l’a vu. » C’est cool de voir à quel point les gens se rallient à ma cause. J’ai, en quelque sorte, fait ce que tout le monde, à un moment ou à un autre, a rêvé de faire. Genre, « Et puis merde, j’en peux plus. C’est stupide. Je vais faire quelque chose d’autre. Je vais devenir mon propre patron. »

Comment tu t’es mise à consommer du cannabis ?
Je suis Alaskienne. Les Alaskiens fument du cannabis. C’est comme ça, c’est tout. Mais la première fois que j'ai essayé quand j’étais au lycée, je n’ai pas du tout aimé. Donc j’ai arrêté complètement et j’ai commencé à boire, ce qui est également un énorme problème en Alaska. Quand j’étais à la fac, je buvais tellement que j’ai fini par ne plus aller en cours. J’ai raté un semestre entier et j’ai dû rattraper énormément de cours. Sur 7 matières, je les ai toutes ratées, à part le sport, et c’est seulement parce que le prof avait de la peine pour moi.

Publicité

Je savais que l’alcool n’allait pas me laisser devenir la personne que j’étais destinée à être. J’avais besoin de me mettre à un truc moins nocif, et j’ai commencé à fumer de la weed. J’ai eu d’excellentes notes le semestre suivant – et à tous les semestres qui ont suivi. J’ai été diplômée avec la mention bien… parce que je fumais de l’herbe ! Je posais mon cul chez moi et faisais ce que j’avais à faire, et je ne me suis jamais réveillée avec la gueule de bois ; je ne me suis jamais retrouvée à écraser une famille sur la route non plus !

Charlo, entourée de weed. Photo via Facebook.

J’imagine que tu fumes seulement dans un « but récréatif » et que tu n’as pas de recommandation médicale particulière.
Je trouve le terme récréatif assez drôle. Qui dit que s’asseoir et fumer un joint qui a un effet relaxant sur vous est très différent que de prendre un Zoloft – ou n’importe quel antidépresseur ? Vous ne diriez pas que prendre un Zoloft est récréatif, je crois.

Je crois voir où tu veux en venir.
Voilà : pour moi, c’est médical. Je pense que la plupart des gens qui fument du cannabis le font pour des raisons médicales de toute façon.

Pour les gens qui ne sont pas au courant de la situation en Alaska, quelles sont les dernières nouvelles concernant une possible légalisation ici ?
Les sondages montrent que le soutien diminue, c’est pour ça que j’ai abandonné ma carrière. Les sondages ont montré que la campagne de terreur de la part de l’État continuait de fonctionner ; j’ai dû partir pour être certaine que les Alaskiens sachent ce qui est réellement en jeu. Et l’opportunité qui s’offre à nous.

Publicité

Es-tu optimiste ?
Oh oui. Si vous pouviez voir nos messages Facebook et nos commentaires, ou les mails que nous recevons – ce sont des gens qui n’avaient jamais eu envie de voter auparavant. On reçoit des trucs genre : « Vous avez du courage, et je m’inscris pour voter, allons-y et faisons-le. Je suis derrière vous. » Nous savons que nous allons dans le bon sens.

Cool. Tu as une variété d’herbe préférée ?
Je dirais Jack. La Jack Herer. C’est un classique.

Ç’en est un. Je suppose que ton cannabis social club est uniquement composé d’adhérents privés pour l’instant ?
Oui. Jusqu’à ce que nous votions pour la légalisation. L’aspect médical sera – dans un premier temps, du moins – toujours pris en compte. Nous prévoyons d’étendre notre champ d’activité et de commencer la vente au détail pour nos patients. Mais nous devons nous assurer que ces derniers, partisans du cannabis médical donc, ne se fassent pas baiser une fois la légalisation acceptée. Cette initiative ne fait aucune différence entre le cannabis médical et le cannabis récréatif.

En Alaska, les électeurs ont décidé de légaliser le cannabis médical dès 1998. 16 ans plus tard, l’État n’a pas mis en place de structure pour que les patients puissent en acheter – ni autorisé le moindre dispensaire. Du coup, ils se sont fait avoir.

D’accord. As-tu un conseil à donner pour quiconque voudrait démissionner de manière spectaculaire ?
Faites ça bien. Si vous vous apprêtez à quitter définitivement votre job, faites-le bien. Pourquoi ? Parce que votre job est probablement nul, donc allez-y et récupérez ce que vous pouvez. Si votre job vous donne accès à des informations qui peuvent vous aider dans ce que vous ferez après – eh bien, prenez-les ! Si vous êtes juste un rouage au sein d’une énorme machine, et que vous savez que vous êtes parfaitement remplaçable – laissez-les vous remplacer. Soyez courageux. Et assurez-vous que vous irez bien après ça.

Suivez Patrick McGuire sur Twitter.