FYI.

This story is over 5 years old.

Tech

Des ingénieurs en optique ont réussi à souder des neurones pour la première fois

Un outil prometteur pour la neurochirurgie.

Une équipe d'ingénieurs canadiens a mis au point une technique pour souder deux neurones individuels ensemble. Pour le moment, la méthode, qui fait intervenir un laser et est décrite dans le dernier numéro de Scientific Reports, offre aux chercheurs un outil utile pour construire rapidement des circuits de neurones expérimentaux. À terme, elle pourrait même être utilisée par les neurochirurgiens désireux de réparer des tissus nerveux en urgence.

Publicité

Le problème de ce genre de tissus est qu'ils ne se régénèrent pas très efficacement. Contrairement à la plupart des autres cellules, les neurones sont incapables de se diviser. Cette caractéristique freine considérablement la neurogénèse, chez les adultes tout particulièrement. Ainsi, la « guérison » des tissus nerveux est très limitée en comparaison des autres tissus du corps. Cela explique en grande partie pourquoi les maladies et les lésions du système nerveux ont généralement une triste issue.

« Il est essentiel de réussir à développer des méthodes précises pour connecter individuellement des axones à des cellules nerveuses sélectionnées avec soin, » explique l'article. « Cela consistera une avancée considérable de la méthode scientifique en neurologie, qui ouvrira également l'horizon de la recherche en biochimie et en électrophysiologie. »

Pouvoir connecter rapidement des neurones entre eux permettrait également d'observer les processus impliqués dans la neurogénèse elle-même, durant laquelle des cellules souches neurales se transformes en neurones spécialisés, et les divers mécanismes qui occasionnent la dégradation des neurones.

« Pour comprendre les processus physiopathologiques complexes et les intervalles de temps durant lesquels il est possible d'empêcher la formation de blocs de conduction et la mort axonale, il faut développer des techniques qui permettent de connecter des terminaisons nerveuses immédiatement après une lésion, et de conserver la viabilité des neurones en bonne santé, » ajoutent les auteurs.

Publicité

Image: Elezzabi

La méthode mise au point par le groupe d'Alberta utilise des impulsions laser femtosecondes, c'est-à-dire qui durent un millionième de milliardième de seconde. Ces impulsions laser infinitésimales permettent de réaliser des opérations si précises qu'elles sont déjà utilisées en nanochirurgie cellulaire, en isolation cellulaire et transfection embryonnaire (où des acides nucléiques sont ajoutés aux cellules grâce au bombardement de photons). La suppression ou l'ionisation d'un matériau grâce aux impulsions femtosecondes a l'avantage de ne pas endommager les cellules et les tissus environnant la cible.

L'utilité toute particulière des impulsions femtosecondes est liée à leur capacité à cibler des cellules avec une précision extraordinaire. Elles contribuent ainsi à étudier comment les neurones et les axones (les « queues » longues des neurones qui les relient les uns aux autres) se régénèrent. Parce que les impulsions peuvent casser les liaisons neuronales, elles peuvent aussi permettre de fusionner les neurones par soudure. C'est en tout cas l'opération que les chercheurs d'Alberta ont réalisée il y a peu. Fusionner des amas de cellules au laser avait déjà été réalisé auparavant, mais c'est la première fois qu'une équipe parvient à le faire neurone par neurone.

« En configurant le laser avec précision, nous avons pu induire un processus appelé hemofusion au niveau du point de contact entre deux membranes de phospholipides, » expliquent-ils. En bref, cela signifie qu'après avoir sélectionné deux neurones, ils ont réussi à fusionner leurs membranes externes, sans détériorer le cœur même du neurone. Ainsi, les deux neurones ont conservé leur intégrité tout en étant connectés l'un à l'autre.

« Nous espérons que cette méthode de connexion nanochirurgicale neuronale induite par laser femtoseconde révolutionnera les neurosciences et la neurochirurgie. Grâce à elle, nous pourrons étudier les effets de la connexion neuronale avec une précision sans précédent, » conclut le quotidien. « La préservation de la viabilité du réseau neuronal permettra d'étudier de processus physiopathologiques complexes jamais étudiés auparavant. Nous espérons des applications thérapeutiques pour les lésions et les maladies neuronales. »

Cette phrase allusive signifie que les chercheurs espèrent pouvoir relier le cerveau et la moelle épinière au niveau cellulaire pour des patients chez qui ces connexions sont endommagées.

Évidemment, entre relier deux neurones dans un récipient et s'attaquer aux 300 trillions de connexions synaptiques du cerveau humain, il y a un pas. Mais il faut bien commencer quelque part.