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Ce qu’on sait sur les scandales sexuels Rozon et Salvail

Le scandale Harvey Weinstein a éclaté il y a deux semaines et ne cesse de prendre de l’ampleur à l’échelle planétaire. Les répercussions au Québec sont directes.
Éric Salvail et Gilbert Rozon.
Photos utilisées pour ce montage: La Presse canadienne. À droite: Mario Beauregard | à gauche: Denis Beaumont

Les têtes commencent à rouler au Québec dans la foulée de la vague immense de #moiaussi et #metoo qui a déferlé sur les réseaux sociaux cette semaine.

La journée de mercredi a fait tomber deux géants du show-business : d'abord l'animateur Éric Salvail, puis l'homme d'affaires Gilbert Rozon.

La descente aux enfers d'Éric Salvail, 48 ans

Pas moins de 11 personnes dénoncent les inconduites sexuelles de l'animateur chouchou du Québec. Le reportage de La Presse révèle des cas qui vont de l'exhibitionnisme au harcèlement répétitif.

De ces 11 victimes, une seule a accepté de donner son nom : Marco Berardini, qui a travaillé avec Salvail dans les années 2000. Il a cessé toute collaboration avec l'animateur après des avances sexuelles grossières à répétition.

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Les gestes déplacés d'Éric Salvail étaient apparemment un secret de Polichinelle dans le monde culturel. Il semble qu'il était commun pour Salvail de montrer son pénis à ses employés, parfois en les surprenant en le déposant sur leur table de travail.

Depuis que la nouvelle est tombée hier, l'animateur et producteur « fortement ébranlé » a annoncé sur Facebook qu'il prenait une pause professionnelle de quelques jours.

L'industrie, elle, semble avoir décidé de prendre une pause de Salvail. Son émission phare, En mode Salvail, a été suspendue par le Groupe V; idem pour son émission d'après-midi sur la radio de Rouge FM. De plus, au moins six de ses contrats publicitaires, dont celles avec Métro et McDonald's, ont été annulés. Radio-Canada a dit mercredi réévaluer ses liens avec Salvail.

En plus des émissions qu'il anime, Salvail est à la tête d'une compagnie de production derrière plusieurs projets importants, et qui détient les droits de certaines des émissions les plus populaires de la province, dont Occupation Double.

La chute de Gilbert Rozon, 62 ans, président du groupe Juste pour rire

La rumeur dit que le nom flottait dans l'air depuis quelque temps déjà.

Et ce qui frappe encore plus dans le cas de Rozon, c'est ce nombre de personnes qui ont parlé à visage découvert d'agressions sexuelles, de viols et d'inconduites sexuelles.

En début de semaine, la réalisatrice Lyne Charlebois avait dénoncé sur Facebook l'impunité d'un homme connu, populaire, riche. Il n'y était pas nommé, mais bien des gens ont reconnu Gilbert Rozon.

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Puis la table a été mise dans la journée de mercredi par l'humoriste Guillaume Wagner, qui s'en est pris directement au président du groupe Juste pour rire, disant refuser de travailler pour la compagnie « tant et aussi longtemps qu'un agresseur en sera le patron ». Rozon avait plaidé coupable d'agression sexuelle sur une femme de 19 ans en 1998. Il avait obtenu une absolution inconditionnelle, et n'avait donc pas fait de prison.

Guillaume Wagner a laissé entendre que de nombreux témoignages récents allaient s'ébruiter sous peu. Et c'est ce qui est arrivé, grâce au travail conjoint des journalistes du Devoir et du 98,5.

Les témoignages recueillis sont troublants et tous liés à un contexte professionnel. Ils couvrent une période très étendue, allant de 1982 à 2016.

Certaines femmes l'accusent de viol, comme la réalisatrice Lyne Charlebois, qui dit que l'agression s'est produite il y a 35 ans au domicile de Rozon, et l'entrepreneure Geneviève Allard, qui dit avoir été violée à l'été 2016, chez elle.

Il y est aussi question de harcèlement et d'agressions sexuelles. Vers la fin des années 80, la recherchiste Anne-Marie Charette, alors âgée de 25 ans, dit avoir subi du harcèlement pendant des mois et qu'une nuit, Gilbert Rozon a insisté pour qu'elle vienne lui porter un dossier dans sa chambre d'hôtel. Aussitôt arrivée, il l'a jetée sur le lit, mais elle est parvenue à s'enfuir.

L'animatrice Pénélope McQuade témoigne qu'à l'époque où elle couvrait le Festival Juste pour rire, en 1998, Rozon s'est jeté sur elle dans les toilettes du « quartier général » du festival, à 4 heures du matin. Il aurait toutefois figé, et elle a réussi à sortir.

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À l'été 2016, Marlène Bolduc, animatrice-cycliste à Vélopousse Maisonneuve, raconte pour sa part avoir été victime de harcèlement sexuel alors qu'elle conduisait Rozon.

Certaines victimes étaient mineures au moment des faits. Sophie Moreau, dont le père était un ami de Rozon, relate qu'elle a été victime de harcèlement verbal alors qu'elle avait à peine 15 ans, en 1988. De son côté, l'actrice Salomé Corbeau raconte avoir subi des attouchements sexuels en plein party de fin de festival, alors qu'elle n'avait que 14 ans, et que personne sur place n'a réagi.

Dans la chronologie des événements de mercredi, c'est d'abord dans une publication Facebook que Rozon a annoncé qu'il quittait ses fonctions à Juste pour rire. « Ébranlé par les allégations me concernant, je souhaite consacrer tout mon temps à faire le point. » Il abandonne du même coup son rôle de commissaire aux célébrations du 375e de Montréal et la vice-présidence de la Chambre de commerce du Montréal Métropolitain.

On a appris mercredi soir que le Service de police de Montréal (SPVM) a ouvert une enquête sur Rozon. Selon une plainte déposée dans l'après-midi, il aurait commis une agression sexuelle à Paris en 1994.

Avant que le scandale éclate au grand jour, La Presse avait contacté Rozon lundi, puisque Geneviève Allard avait partagé sur Facebook une photo de l'homme d'affaires avec le #metoo. Gilbert Rozon avait complètement démenti les accusations de viol et disait être la victime dans cette affaire. L'homme a fait pression pour que la publication soit retirée.