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De fausses nouvelles publiées en 1947 sont à l’origine de vraies X-Files

Bien avant que l'émission des années 90 nous pousse à vouloir croire au paranormal, des documents étiquetés « SM-X » (Security Matter-X) ont fait leur chemin jusqu'au directeur du FBI de l'époque, J. Edgar Hoover.

L'article original a été publié sur Motherboard.

Ce n'est pas tous les jours qu'une demande d'accès à l'information porte autant ses fruits. Des documents du FBI rendus publics récemment ont tout ce qui fait une bonne histoire : soucoupes volantes, rencontres secrètes entre agents du renseignement, et un mystérieux écrasement d'avion. En demandant l'accès à des fichiers à propos d'un homme réputé pour ses théories du complot, Fred Lee Crisman, le journaliste Michael Best a fait une découverte hors de l'ordinaire : de vraies X-Files.

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Bien avant que l'émission des années 90 nous pousse à vouloir croire au paranormal, les documents sur Fred Crisman rendus publics, étiquetés « SM-X » (Security Matter-X), ont fait leur chemin jusqu'au directeur du FBI de l'époque, J. Edgar Hoover. Ils contiennent les informations de l'enquête sur l'un des premiers cas d'activité paranormale aux États-Unis, projeté à l'avant-scène par des médias avides de publier des nouvelles incroyables dans un monde d'après-guerre où le progrès technologique accélérait. Aux premières heures des histoires d'événements paranormaux, comme dans le paysage médiatique changeant d'aujourd'hui, il était facile d'exploiter les médias.

J'ai demandé à Best pourquoi selon lui les fichiers — dont le FBI a longtemps nié l'existence — portaient un nom qui, par coïncidence, évoque l'émission sur les phénomènes paranormaux The X-Files. « Je ne suis pas sûr, mais, si je devais tenter une explication, je dirais que X signifie l'inconnu, comme une variable », m'a-t-il répondu sur Twitter.

Dans le dossier de Crisman, on trouve les documents du FBI a documenté sur ce qu'on a appelé le canular de l'ovni de Maury Island. En juin 1947, Crisman a été témoin d'un incident d'une grande étrangeté, écrit Michael Best. Un ovni aurait volé au-dessus d'une île près de Puget Sound, dans l'État de Washington. Les articles qui ont suivi ont aidé à populariser les histoires d'ovnis. C'était un des premiers exemples de mythes qui sont devenus de fausses nouvelles.

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Cette histoire de soucoupes volantes est d'abord parue dans les pages du Tacoma Times en août. On y lit les affirmations de Crisman et de son partenaire d'affaires, Harold Dahl. Ce dernier disait avoir aperçu plusieurs soucoupes en forme de beigne dans le ciel. L'une des soucoupes aurait laissé échapper une substance qui ressemblait à de la lave et se serait ensuite écrasée, endommageant son embarcation au passage. Ensuite, une personne en complet foncé serait arrivée sur les lieux et lui aurait ordonné de ne pas parler de l'incident. Selon les historiens des ovnis dans la culture populaire, c'est là la genèse de la théorie des hommes en noir.

Dans une entrevue trouvée dans les fichiers du FBI, on lit que Crisman a affirmé être retourné à l'embarcation endommagée le lendemain et avoir ramassé des fragments de la soucoupe volante, qui ont été au cœur du canular qui a proliféré.

Le rapport du FBI, qui fait partie des documents rendus publics, relate que Crisman et Dahl ont envoyé pour analyse des échantillons des fragments de disque à l'enquêteur spécialisé dans les phénomènes paranormaux Raymond Palmer, à Chicago. Palmer s'était beaucoup intéressé aux premières légendes de soucoupes volantes du 20e siècle, avait travaillé pour le magazine Amazing Stories de Ziff Davies avant de fonder le magazine Fate, qui couvre encore aujourd'hui les phénomènes surnaturels.

Palmer a en a parlé à Kenneth Arnold, un pilote au cœur de la supposée première apparition d'un ovni hautement médiatisée. Arnold s'est rendu dans l'État de Washington et a organisé une rencontre au Winthrop Hotel de Tacoma entre lui et les deux témoins, Crisman et Dahl, ainsi que des officiers du renseignement de l'US Air Force.

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À partir de là, l'histoire prend une tournure encore plus étrange. Le lendemain de la rencontre avec les deux témoins, les deux officiers du renseignement sont décédés dans l'écrasement du Bomber B-25 dans lequel ils rentraient. Les médias ont publié les affirmations d'un informateur anonyme : selon ce dernier, l'avion transportait les fragments de la soucoupe et a été descendu pour étouffer l'affaire de l'ovni. Le FBI a conclu que l'informateur devait être Crisman, peut-on aussi lire dans les fichiers rendus publics.

Les allégations ont été publiées comme s'il s'agissait de faits par des médias comme le Tacoma Times et le Boise Statesman, ainsi que le Chicago Times, devenu le Sun-Times l'année suivante, qui a repris l'histoire.

Bien sûr, le FBI a déclaré que toute l'affaire était un canular dans le but d'attirer l'attention. Les agents ont écrit qu'il n'y avait aucun fragment dans l'avion. Selon eux, un problème mécanique a causé l'écrasement de l'appareil.

Des années plus tard, Dahl a avoué qu'il avait menti. Dans un livre publié dans les années 60, The Paranormal and the Paranoid: Conspiratorial Science Fiction Television, Aaron Gulyas a écrit que Harold Dahl pense que de nombreux éléments de l'émission The Invaders ressemblent beaucoup à la vie et aux histoires de Crisman.

Le FBI a conclu que la motivation derrière ce canular était toute simple. Il n'y a pas eu d'ovni ni de conspiration gouvernementale. C'était pour l'argent. L'enquête a permis de découvrir que Crisman et Dahl ont cherché à obtenir de l'argent des médias qui ont publié leur récit. Une motivation différente de l'actuel problème de fausses nouvelles, publiées avec l'intention de manipuler les médias de masse.

En fin de compte, la hausse de la couverture médiatique des activités paranormales a eu du bon. Les mêmes médias spécialisés dans les activités paranormales ont par la suite été reconnus pour leur scepticisme. Le magazine Fate a notamment prouvé que des histoires de phénomènes surnaturels sur lesquels il a enquêté étaient fausses.

On ne peut que souhaiter voir ce degré de scepticisme dans tous les médias.

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