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L’impression 3D nous montre le développement des circonvolutions cérébrales

La compréhension du développement des plis du cerveau pourrait nous aider à pointer l'origine de certaines maladies neurologiques.
Image: Wikimedia

La couche périphérique du cerveau, le cortex cérébral, est constitué d'un ensemble complexe de sillons et replis. On pourrait même dire que la caractéristique principale du cerveau est ce plissement curieux, qui permet d'augmenter la surface du cortex et donc d'obtenir la plus large population possible de neurones corticaux. Cet arrangement anatomique a un lien direct avec l'intelligence : la mémoire, l'attention, la conscience, la pensée, etc. en dépendent. Plus les neurones corticaux sont nombreux, plus l'espèce est intelligente.

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Cependant, nous ne savons pas comment se forment ces plis : c'est un mystère neuroscientifique ancien, toujours d'actualité. La recherche s'est longtemps consacrée à étudier les mécanismes génétiques et cellulaires qui déterminent la croissance corticale ; dernièrement, ce sont les modèles mathématiques et physiques qui ont été privilégiés. Une étude très médiatisée publiée l'été dernier a montré que le développement cortical suivait une fonction mathématique simple : « Une fonction puissante dérivée du produit de la surface corticale et de la racine carrée de l'épaisseur corticale », selon le Scientific American.

Une étude publiée cette semaine dans Nature Physics enquête de nouveau sur le développement cortical en exploitant la piste physique ; en d'autres termes, elle aborde le problème au prisme de la physique plutôt qu'à celui de la biologie. Les chercheurs en question, une équipe internationale basée à l'Université de Harvard et à l'Université de Jyväskylä en Finlande, ont utilisé des matériaux imprimés en 3D pour simuler les premières étapes de la formation du cerveau. Ils ont montré que pendant son développement, le cortex était modelé par d'importantes forces de compression résultant de taux de croissance différents en fonction des couches du cerveau concernées.

Cette découverte permet d'éclairer une ancienne controverse sur le développement de ces fameux plis, et par là, de l'émergence de l'intelligence. Mais elle dégage également des pistes pour comprendre les mécanismes à l'origine de certains troubles neurologiques.

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Le terme technique qui caractérise le développement de plis corticaux est la gyrification. Le cerveau de tous les mammifères est, à l'origine, lisse. C'est au cours du développement fœtal que les gyri (le sommet des plis) et les sulci (les sillons) commencent à se former. Chez la plupart des mammifères, le processus se poursuit après la naissance.

« La gyrification est un moyen efficace de faire rentrer un grand cortex dans un crâne plutôt petit ; elle donne également des avantages naturels en terme de traitement de l'information. Cela explique sans doute pourquoi la sélection naturelle l'a retenue, » expliquent les auteurs. « Cependant, bien que la gyrification possède une justification fonctionnelle évidente, les mécanismes physiologiques qui contribuent à ce processus sont, eux, assez obscurs. » Les auteurs ont donc évoqué deux mécanismes hypothétiques : le « prepatterning biochimique » du cortex (le pliage est le produit de processus chimiques intégrés dans le cortex lisse), ainsi qu'un processus théorique au cours duquel les neurones de la substance blanche, placés juste en-dessous du cortex, appliqueraient une tension précise à des endroits ciblés afin de provoquer le développement des plis.

Aucune preuve ne vient supporter ces deux hypothèses, cependant.

« À l'heure actuelle, l'hypothèse la plus probable est aussi la plus simple : l'expansion tangentielle de la couche corticale par rapport aux sous-couches provoque une contrainte de compression qui conduit mécaniquement au pliage du cortex », expliquent les auteurs. « Ce modèle de pliage mécanique produit des motifs de gyri et de sulci de tailles et formes réalistes, tout à fait conformes à la géométrie du cerveau telle que nous la connaissons. Cependant, l'hypothèse n'a pas été testée dans des conditions réalistes, c'est-à-dire en 3D dans le cadre du développement fœtal. »

C'est à ce moment là que l'impression 3D intervient. Le modèle physique mis au point par l'équipe est fait de divers gels imprimés qui augmentent de volume à des taux de croissance différents une fois placés dans une solution liquide. Ce gonflement simule parfaitement la croissance du cerveau humain ; ainsi, il est possible d'observer la gyrification sans avoir besoin… d'ouvrir un crâne de foetus, par exemple.

« Le gonflement met en tension les couches extérieures du gel et intérieures du gel, et la compression produit en surface des motifs de plis qualitativement similaires aux circonvolutions cérébrales, » écrivent les chercheurs. Les observations physiques ont ensuite été traitées par un modèle mathématique adéquat.

Il faut espérer que ces découvertes sur le développement cortical nous aideront à mieux comprendre le développement neurologique et les troubles neurodéveloppementaux. La gyrification est impliquée dans la schizophrénie, l'autisme et les troubles graves de la migration neuronale, pour n'en nommer que quelques-uns. Il est intéressant de considérer l'hypothèse selon laquelle certaines maladies neurologiques pourraient avoir une origine physique plutôt que biologique. Même si, bien sûr, il faut la prendre avec des pincettes.