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La "cité maya" découverte par un ado pourrait en fait être un champ de weed

C'était une belle histoire. Mais William Gadoury, 15 ans, n'a peut-être bien trouvé qu'une vaste plantation de beuh au Mexique.

Elle était belle, cette histoire de l'ado canadien de 15 ans qui aurait découvert une cité maya "disparue" en étudiant les constellations. Tellement belle que tout le monde a voulu y croire, et que William Gadoury - c'est son nom - s'est retrouvé cité par des dizaines de médias suite à la première mention de la fable dans le Journal de Montréal le 7 mai. Le jeune Québécois, passionné par les étoiles, aurait étudié "l'astronomie des Mayas" et comparé la position des étoiles avec la géographie des villes, avant de s'apercevoir qu'il manquait une ville au point où apparaît une étoile dans la constellation correspondante. Or, miracle ! Si l'on observe les images satellites, on constate (supposément) qu'à cet endroit précis se trouvent justement des formes semblant correspondre à des vestiges. Il n'en fallait pas plus pour que l'adolescent se trouve propulsé au rang de petit prodige et fasse le tour des journaux, à tel point que le Journal de Montréal affirmait carrément qu'il était devenu "une petite vedette à la NASA." Un conte de fées, décidément.

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Image : Google Earth / NASA.

Trop beau pour être vrai ? Évidemment. La réponse des scientifiques n'a pas tardé, et elle est sans appel : non, ce brave William n'a pas découvert une cité maya disparue. En revanche, il se pourrait bien qu'il ait découvert assez de weed pour que lui et sa famille puissent regarder les étoiles avec un sourire béat pendant quelques années. C'est en tout cas ce qu'affirme un anthropologue du laboratoire d'archéologie mésoaméricaine de l'université de San Diego, Geoffrey E. Braswell, qui assure connaître parfaitement la zone en question et affirme sans ambages qu'il ne s'agit absolument pas de pyramides mayas. Interrogé par Gizmodo, il se veut même plus clair : « Ce sont soit des champs de maïs abandonnés, soit des plantations de marijuana en bonne et due forme. » Ce qui n'aurait rien d'étonnant dans la région, celle du Laguna El Civalon, dans le sud-est de l'état mexicain du Campeche, ou les plants de weed ne sont pas rares.

Le chercheur affirme que lui et ses équipes se sont rendus à maintes reprises dans cette zone, dans le cadre d'un vaste projet archéologique germano-mexicain. « Quand vous voyez ce genre d'images prises depuis l'espace, vous n'avez aucune idée de ce dont il s'agit réellement, explique-t-il. Il faut aller voir par soi-même. 9 fois sur 10, ce n'est rien, et puis parfois, vous tombez sur quelque chose d'intéressant. Mais là, il se trouve qu'on est déjà allés exactement à cet endroit, et qu'il n'y a aucune pyramide maya dans les parages. »

Même son de cloche du côté de Marie-Charlotte Arnauld, directrice de recherche à l'ArchAm (Archéologie des Amériques), interrogée par Sciences & Avenir. « Avec mes collègues, on rit beaucoup en regardant la carte censée situer l'emplacement de la cité. » Et la chercheuse d'ironiser au passage sur les multiples déplacements de la fameuse cité, passée en quelques jours du Bélize au Mexique, et sur ses dimensions supposées, totalement aberrantes ( « de 80 à 120 km2 » selon le Journal de Montréal, alors que Tikal, l'un des plus grands sites archéologiques et centres urbains de la civilisation maya, fait « à peine 20 km2 » ). Le tout, évidemment, dans une zone ultra fréquentée par les archéologues qui, comme chacun sait, sont du genre à ne pas repérer une immense cité maya quand ils passent juste à côté.

Autre aspect absurde de cette histoire, souligné là encore par Marie-Charlotte Arnauld, cette fois dans Arrêt sur Images : « Cette histoire de planification de l'ensemble des cités en fonction des constellations est une aberration. Les constellations sont des constructions culturelles (il s'agit juste de relier des points), les nôtres nous viennent des Grecs. »

Fin de la belle histoire, donc. William Gadoury n'a sans doute pas découvert grand-chose, si ce n'est que les journalistes sont parfois un peu trop prompts à s'emballer pour quelques likes et un bon titre. Et, peut-être, un champ de White Widow.