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Les diamants «  dopés » sont la clé de l'informatique quantique

Diamant + silicium = futur

Une équipe de chercheurs du MIT, de l'Université d'Harvard, et des Laboratoires Sandia vient de faire une avancée majeure vers la construction de véritables ordinateurs quantiques parfaitement fonctionnels. Leur travail, décrit dans le dernier numéro de Nature Communications, propose une nouvelle façon d'utiliser des diamants pour construire des circuits optiques - ces puces qui utilisent la lumière plutôt que le courant électrique.

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N'en déplaise au battage médiatique sur l'informatique quantique qui, parfois, se mâtine de franche désinformation, le concept d'ordinateur quantique est encore largement théorique. Construire une machine quantique est extrêmement difficile, et il est impossible de contourner cette difficulté, même avec une poignée de génies aux commandes. Il faut dire que le but des chercheurs en informatique quantique est insensé : ils veulent exploiter une propriété extrêmement étrange et fragile du monde quantique - la capacité des particules à adopter simultanément deux états physiques contraires : en haut et en bas, à gauche et à droite, existant et non existant.

Si nous pouvions utiliser cette propriété de la même façon que nous utilisons le courant électrique grâce à un transistor, les choses seraient plus simples. Mais gérer et manipuler des qubits, les unités d'information inscrites sur ces mêmes particules qui se caractérisent par la superposition de deux états, est très dur. Le simple fait d'observer un système quantique modifie ce dernier ; ainsi, si ce système est le support d'une information, celle-ci est perdue au moment-même où les chercheurs tentent de la récupérer.

Pourtant, il se pourrait bien qu'il y ait une solution à ce problème épineux : les diamants. En effet, la structure en treillis presque parfaite des atomes qui forme le cristal de type diamant pourrait offrir une excellente base à un circuit quantique. Il suffirait de stocker le qubit au sein d'un « défaut » inhérent à la structure du diamant, que les chercheurs connaissent depuis longtemps. En effet, quoique la structure cristalline du diamant soit soigneusement ordonnée, il manque ça et là un atome dans l'arrangement harmonieux de ses particules. Ainsi, un autre atome peut se faufiler au coeur de l'emplacement en question afin remplacer l'atome de carbone manquant. Le défaut du diamant peut lui-même être associés des électrons libres arrangés en essaim, parmi lesquels on trouve des particules stockant des informations (qui sont transmises autour du diamant sous forme de photons, ou particules de lumière).

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Ce petit essaim d'électrons émet naturellement des particules lumineuses capables de "refléter" le phénomène de superposition quantique (la particule ou le système de particules possédant plusieurs états simultanément). Ainsi, on a sous la main un système de miroir qui permet de récupérer les informations du qubit logés dans le défaut du diamant, sans le perturber.

Le défi consiste alors à trouver et le remplaçant idéal à l'atome de carbone manquant au sein de la structure cristalline du diamant - c'est ce que l'on appelle le dopant. Or, c'est grâce au choix de ce dopant que la nouvelle étude a pu réaliser des progrès extraordinaires.

Le dopant le plus étudié dans le cadre des circuits optiques à base de diamants à défaut est l'azote. Il est suffisamment stable pour maintenir le phénomène de superposition quantique désiré, mais il émet de la lumière à des fréquences assez limitées. C'est comme si vous aviez trouvé le système de chiffrement parfait, mais qu'on ne pouvait l'utiliser que sur des messages dont les caractères appartiennent au premier quart de notre alphabet.

Ici, les chercheurs ont décidé de laisser tomber l'azote et d'essayer le silicium. En effet, les atomes de silicium intégrés dans la structure du diamant sont en mesure d'émettre de la lumière à des fréquences plus basses que l'azote. Ils nous fournissent, en quelque sorte, une meilleure résolution. Mais le fait de pouvoir représenter l'information avec une précision accrue a également un coût : des états quantiques plus précaires. Par conséquent, pour que l'information puisse être récupérée sans pertes, les diamants doivent être conservés à une température très proche du zéro absolu, là où les états quantiques de l'azote pouvaient résister à une chaleur plus importante. Dans les deux cas, utiliser un ordinateur portable quantique à des températures proches du zéro absolu n'est pas très commode, et il faudra donc améliorer ce système.

Pour implanter le silicium dans les défauts du diamant, les chercheurs ont eu recours à un procédé en deux étapes. Ils ont d'abord "éclaté" la structure du diamant avec un laser afin de créer des emplacements disponibles, puis l'ont chauffé jusqu'à ce que ceux-ci se déplacent au sein de la structure et se lient avec les atomes de silicium. Le résultat est un réseau possédant un nombre impressionnant d'atomes de silicium, parfaitement incorporés à la structure cristalline.

Ces résultats sont extrêmement prometteurs, et constituent un grand pas en avant vers l'élaboration « d'interfaces matière-lumière efficaces basées sur des défauts semi-conducteurs couplés à des dispositifs nanophotoniques », c'est-à-dire la base probable de notre futur ordinateur quantique.