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La pandémie va nous couvrir de produits électroniques contrefaits

En entraînant la fermeture des usines de puces et une explosion de la demande en produits électroniques, le Covid-19 fait le lit des faussaires.
Semiconductor contrefaçon
Justin Sullivan / Getty Images

Les semi-conducteurs sont à la base des circuits électroniques. Les propriétés physiques de ces matériaux nous permettent de contrôler le débit des électrons – et donc de faire circuler des informations – au sein d’un appareil plus ou moins moderne. Le plus célèbre représentant de cette grande famille, le silicium, est un composant crucial des transistors des vieilles radios mais aussi des derniers microprocesseurs. Cependant, ces derniers temps, les semi-conducteurs se sont faits rares. 

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Si vous êtes en quête d’une console ou d’une carte graphique de nouvelle génération, vous avez forcément leur absence sur les étals depuis des mois. Bien que ce manque puisse être attribué aux scalpers, ces individus qui achètent pour revendre avec une marge délirante, ou aux mineurs de crypto-monnaies, le Covid-19 est largement reconnu comme principal responsable. La pandémie a entraîné tout à la fois la fermeture des plus grandes usines de semi-conducteurs et une explosion de la demande des produits électroniques de loisir : enfermé chez soi, on joue forcément un peu plus à la Playstation. 

La crise des semi-conducteurs n’a fait qu’empirer au fil des derniers mois. Les frères ennemis Apple et Samsung peinent à construire certains de leurs produits. Nvidia fait exploser les prix de ses cartes graphiques pour jouer sur une demande extrêmement forte. Même Peugeot est touché : le constructeur automobile français a annoncé cette semaine que les dernières unités de son précédent modèle de 308 seraient équipées de compteurs à aiguilles, faute de silicium pour fabriquer des tableaux de bords électroniques. Dans un tel contexte, forcément, les faussaires se frottent les mains. 

De nombreux experts affirment que la pénurie des semi-conducteurs va se poursuivre en 2022. Pour beaucoup, la longévité de la crise pourrait aussi déclencher un « boom » des composants électroniques contrefaits. Diganta Das, un chercheur spécialisé dans ces fausses pièces au sein du Center for Advanced Life Cycle Engineering (CALCE), affirme ainsi dans ZDNet : « Si, la semaine prochaine, vous avez besoin de 5 000 pièces pour empêcher la fermeture de votre ligne de production, vous serez en situation d’achat de détresse et vous baisserez votre garde. » 

Diganta Das estime que les composants contrefaits inondent déjà le marché et que le nombre de signalements pour fraude va gonfler au fil des six prochains mois. Cependant, les plus grandes entreprises sont vraisemblablement moins concernées par le problème que les petites entités commerciales : quand les premières entretiennent des relations privilégiées avec les constructeurs reconnus et disposent de trésoreries assez conséquentes pour tenir la distance, les secondes ramassent les miettes auprès de revendeurs tiers et vivent au jour le jour sur des budgets vulnérables. Imaginez : vous êtes un patron en détresse qui doit choisir entre la banqueroute et la survie par la vente de produits défectueux. Que choisissez-vous ?

Les contrefaçons électroniques peuvent être des puces montées de toutes pièces ou de vieux composants « reconditionnés » en composants modernes. Ces boubous Gucci de la Silicon Valley peuvent entraîner des inconvénients mineurs – un produit de grande consommation peu performant et promis à une mort rapide – comme de graves problèmes, notamment lorsqu’ils se fraient un chemin jusque dans des équipements militaires. Ce problème n’a pas attendu la pandémie pour devenir majeur : selon le cabinet de surveillance des marchés noirs Havoscope, le marché des semi-conducteurs contrefaits pesait presque 170 milliards de dollars en 2019. Nous avons beau être déconfinés, le virus va nous ennuyer encore un moment. 

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