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Crime

Les violences font chuter la production de pétrole dans le delta du Niger

Les multinationales Chevron et Shell ont été contraintes de fermer temporairement plusieurs sites de production dans la région, alors que les ouvriers de l'industrie pétrolière demandent à être évacués.
Photo de Akintunde Akinleye/Reuters

Des ouvriers de l'industrie pétrolière du Nigeria demandent aux entreprises présentes dans le pays d'évacuer leur personnel stationné dans le sud du delta du Niger, en raison d'une récente recrudescence des attaques contre les installations pétrolières. Ces attaques répétées ont fait chuter la production de brut à un niveau historiquement bas en Afrique de l'Ouest.

Des hommes armés ont tué ce lundi des policiers nigérians dans le sud du delta du Niger, selon la police. Le porte-parole de la police, Ahmad Mohammad, a déclaré qu'une embuscade a été tendue aux officiers dans la communauté Okobie alors qu'ils se rendaient vers Yenago, la capitale de l'État de Bayelsa. Selon lui, il est difficile de savoir qui se cache derrière cette attaque.

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Les employés de Shell du champ pétrolifère de Bonga (sud du delta du Niger) ont été évacués suite à des menaces, a fait savoir ce lundi un représentant syndical. En fin de semaine dernière, c'est la compagnie Chevron qui avait été contrainte de fermer temporairement sa plateforme pétrolière d'Okan, qui produit 35 000 barils de brut par jour, à cause de la multiplication des attaques.

Les attaques contre les pipelines et les kidnappings se multiplient dans le delta, où est concentrée la majeure partie de la production de pétrole du Nigeria, depuis la diffusion d'un mandat d'arrêt en janvier visant un ancien chef rebelle accusé de corruption.

Les locaux demandent depuis longtemps une meilleure répartition des revenus liés à l'industrie du pétrole. Les ventes de brut représentent 70 pour cent du revenu national du Nigeria, mais le delta marécageux n'a jamais vu la couleur de cet argent.

Suite aux dernières attaques, le directeur de la branche de Warri du syndicat de l'industrie pétrolière Nupeng, a expliqué à Reuters que les compagnies pétrolières devraient faire évacuer leurs ouvriers.

« La meilleure chose à faire pour une entreprise raisonnable, c'est d'évacuer ses effectifs, » pose Cogent Ojobor du syndicat Nupeng.

De son côté, Chika Onuegbu, le patron d'un autre syndicat (le Trade Union in Rivers state in the Delta), explique que Chevron a évacué certains de ses employés dans le delta, imitant Shell.

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« Il y a de gros risques autour de plusieurs installations du delta du Niger à cause des attaques récentes, » dit Onuegbu. « Ceux qui ont été évacués sont ceux qui ont vu leur plateforme attaquée, mais les autres continuent de travailler. »

Les attaques contre les infrastructures pétrolières du Nigeria se multiplient depuis le début de l'année. Les violences ont fait gravement baisser la production de pétrole — atteignant son niveau le plus bas depuis près de 22 ans. D'après des données obtenues par Reuters, cette chute de la production impose une intense pression sur les finances du pays.

À cause des violences, la production de pétrole au Nigeria est de 1,69 million de barils par jour — son niveau le plus bas depuis juin 2007, quand la production avait atteint 1,68 million de barils par jour, d'après des données de l'Agence internationale de l'énergie.

Si Shell assure que les récentes attaques n'ont pas encore eu d'effets sur sa production, son champ de Forcados est fermé depuis février suite à une attaque contre un pipeline. Ainsi Shell doit se priver d'un site de production qui produisait 250 000 barils par jour.

Une nouvelle diminution de la production de certains sites pourrait encore faire baisser la production nationale et atteindre 1,46 million de barils par jours comme en août 1994.

« Ce n'est pas une bonne situation, » explique à Reuters, Eugene Lindell, un analyste chez JBC Energy à Vienne. Puisque la production mondiale est au-dessus des normales, les prix n'augmentent pas. « Ils produisent moins et ils gagnent moins d'argent. »

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Le budget 2016 du pays, adopté la semaine dernière, estime que 2,2 millions de barils seront vendus à 38 dollars. Un rapport de l'Agence d'information américaine sur l'Énergie indique que les sabotages de pipelines et les perturbations de l'approvisionnement en pétrole ont augmenté en 2006 — mettant la pression sur les finances du pays.

« Le Nigeria dépend largement des revenus du pétrole, son économie est fortement affectée par les variations des prix mondiaux du pétrole et/ou les changements dans sa production de pétrole, » peut-on lire dans le rapport de l'agence américaine.

Le président Muhammadu Buhari a annoncé que les « vandales et saboteurs » seraient poursuivis dans le delta. Des observateurs expliquent que les violences pourraient faire fuir les investisseurs du pays.

« Si cela continue comme ça… les entreprises ne vont plus considérer le Nigeria dans leur champ d'implantation, » craint Lindell.

Buhari a renouvelé une amnistie de plusieurs millions de dollars signée avec les rebelles en 2009 pour qu'ils arrêtent d'attaquer les sites pétroliers. Mais il les a énervés en mettant fin à de généreux contrats de protections des pipelines.


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